Entretien avec Sylvie Francois, Présidente de Toit et Joie - Poste Habitat

Culture

Partenariat

Publié le 07/09/2021

Pour cette rentrée 2021, nous vous proposons un entretien avec Sylvie François, Présidente de Toit et Joie – Poste Habitat, ancienne DRH de la Banque Postale. Discussion des enjeux actuels du secteur, importance des partenariats associatifs ou encore place du développement culturel dans l’organisation du groupe Poste Habitat, sont notamment abordés dans cette interview.

Quels sont les enjeux majeurs auxquels le logement social est selon vous confronté ?

Il faut d’abord construire davantage. Nous manquons encore en France de logements sociaux pour tous ceux qui ne peuvent, faute de ressources suffisantes, se loger dans le parc privé.

Il faut aussi accélérer les rénovations énergétiques. Grace à des efforts constants depuis des années, le parc Hlm est de meilleure qualité thermique que le parc privé. Mais, face aux enjeux climatiques, la rénovation doit se poursuivre avec vigueur.

Enfin, la mission des organismes Hlm ne s’arrête pas au logement. Les locataires du parc social sont des citoyens qui, comme tous les autres, aspirent à une vie pleine et sereine quel que soit le quartier où ils habitent.

Pour agir avec efficacité dans ces trois domaines, les bailleurs sociaux ont besoin de se questionner en permanence. Ils ont aussi besoin d’être stimulés, aidés, appuyés et non pas brutalisés par des attaques injustifiées.

Qu’est-ce qui vous a poussé, chez Toit et Joie, à conduire de si nombreux partenariats avec les associations ?

Les  innovations sociales et intellectuelles majeures de notre temps viennent de plus en plus des associations. Qui a inventé le droit au logement opposable ? Une association ! Qui s’est battu pour la définition juridique du logement décent ? Une association ! Qui sont les fers de lance des combats sur le climat, la malbouffe, la lutte contre l’artificialisation des sols ? Des associations…

Nous devons travailler en partenariat avec elles, parce que nous sommes complémentaires.

Prenons l’exemple du logement d’urgence et du logement spécifique destiné à des ménages en grande difficulté (pensions de famille, logements pour femmes victimes de violence…). Nous, organismes Hlm, savons construire des bâtiments, les gérer et les entretenir. Chez Toit et Joie comme ailleurs, nous savons aussi développer des actions sociales de proximité. Mais, nous ne sommes pas nécessairement qualifiés pour accompagner ces personnes dans tous les domaines où elles ont  besoin de l’être. Nous avons donc noué un partenariat avec une association importante, Aurore, avec qui nous ne nous contentons pas de partager des missions.

Si le partenariat a prospéré et réussi, c’est que nous avons d’emblée démontré que nous n’étions pas seulement des loueurs de murs. Nous montons avec nos partenaires associatifs les programmes de construction et de rénovation. Nous les travaillons, nous adaptons l’architecture au projet social et surtout nous organisons la perméabilité entre nos différents  types de logements. On n’est pas destiné à rester en hébergement d’urgence à vie et a contrario, certaines personnes logées en Hlm n’y sont pas bien et ont besoin de trouver un autre type d’hébergement, comme la pension de famille.

Travailler avec une association sur le long terme permet aussi d’infuser les meilleures pratiques des uns et des autres dans nos deux structures. A partir de 2012, nous nous sommes collectivement sensibilisés aux problématiques de santé mentale par notre engagement dans l’expérimentation « Un chez soi d’abord » portée par Aurore, qui vise à loger des personnes atteintes de troubles psychiques sévères et vivant à la rue. En travaillant sur ce projet, nous avons appris à appréhender la maladie mentale. Parallèlement, nous avons contribué à construire avec Aurore un projet d’équipe mobile médico-sociale afin de soutenir nos locataires confrontés à des problématiques de santé mentale, dépassant largement le cadre des 10 personnes insérées dans le cadre du programme « Un chez soi d’abord ».

Cette équipe mobile mise en place en 2012 existe toujours et a évité bien des hospitalisations et bien des expulsions.

 

Avec quel autre type d’associations travaillez-vous ?

Forts du constat que nos locataires ont parfois peu, ou difficilement, accès à la culture, nous avons créé une direction de la culture pour développer des actions culturelles dans nos quartiers. Cet été, 13 évènements culturels organisés en pied d’immeuble ont été proposés à nos locataires, avec notamment le festival Au-delà des toits, et nous accompagnons plus de 20 résidences d’actions culturelles cette année.  Pour mener à bien ces projets, il faut des compétences artistiques. C’est ainsi que nous avons créé des partenariats avec des compagnies théâtrales, des plasticiens, des associations… Les locataires accueillent en résidence ces artistes, découvrent leur travail, montent des spectacles avec eux et participent au processus de création.

On développe ainsi la solidarité, la cohésion sociale, l’ouverture à l’autre. Cela permet aussi parfois de remplacer certaines activités perturbantes pour nos locataires par une présence artistique.

Est-ce bien le rôle d’un bailleur ?

Je vous réponds oui sans l’ombre d’une hésitation. Au demeurant, en lisant les historiens du logement social, on voit bien que  les organismes Hlm ont toujours eu d’autres missions que celles de simplement loger.

Aujourd’hui un organisme Hlm doit loger et agir pour l’emploi, la culture, la vie sociale, l’écologie … Bien sûr avec le monde associatif !

 

Sylvie François, présidente de Toit et Joie

Sylvie François est devenue DRH de La Banque Postale et des services financiers de La Poste en 2008, avant de prendre ses fonctions de directrice générale adjointe du Groupe La Poste, en charge des ressources humaines et des relations sociales, en 2012. Elle a été élue Présidente du conseil d’administration de Toit et Joie en juin 2017.

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